Affaire ART : « Le Ministère public a fait pire que FAILLIR »

Affaire ART : « Le Ministère public a fait pire que FAILLIR »
Jean Louis Beh Mengue, directeur général de l'Agence de Régulation des Télécommunications (ART) de février 1999 à juin 2017.

Me Claude Assira déplore le défaut d’éléments à charge contre son client, Jean Louis Beh Mengue. Au cours des plaidoiries de la défense tenues le 08 octobre dernier au Tcs, les Avocats de l’ancien directeur général de cette structure publique ont plaidé non coupable des faits reprochés à leur client.

Par Florentin Ndatewouo

 

Me Claude Assira ne met pas les gants. L’Avocat de Jean Louis Beh Mengue accuse l’accusation. Le 08 octobre dernier, il remet en cause la manière avec laquelle le Ministère public a mené ses poursuites contre son client : « Où avez-vous vu un Ministère public qui poursuit pour un montant de 18 milliards Fcfa sans produire la moindre pièce ? » Devant la collégialité du Tribunal criminel spécial (Tcs) à Yaoundé, l’Avocat de la partie défenderesse n’est pas au bout de ses interrogations : «Pourquoi les autres personnes qui étaient visées dans le rapport, ne se sont pas présentées ici pour s’expliquer ? » De quoi laisser « PERPLEXE »  Me Assira.

Me Claude Assira, l'un des Avocats de l'accusé Jean Louis Beh Mengue Yaoundé/08/10/2021.

Le défenseur de l’accusé Jean Louis Beh Mengue déplore « le fait que le Ministère public ait fait le choix d’assoir son accusation UNIQUEMENT sur le rapport de la mission de contrôle du Conseil supérieur de l’Etat (Consupe). » A cet effet, la défense regrette ce qui apparait à ses yeux comme des failles de la part de l’accusation : « Le Ministère public a fait pire que FAILLIR et ça c’est grave. »

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Son collègue ne dira pas le contraire. Avant l’intervention de son confrère, Me Ndongo revient sur les différents chefs d’accusation dirigés à l’encontre de son client. Ces accusations portent sur le détournement de biens publics (Dbp) à travers les appuis aux tutelles, les fonds de souveraineté, la participation de l’ART au comice agropastoral.

Au sujet de l’appui aux tutelles, Me Ndongo martèle : « Aucun texte n’interdit à l’ART d’apporter son appui aux tutelles. » Il fait savoir que lesdits appuis se faisaient dans le cadre règlementaire, avec ordonnancement, et visas du contrôleur financier, suivi  des virements comptables. A l’appui de son argumentaire, il convoque les dispositions du décret du 08 septembre 1998 portant organisation et fonctionnement de l’Agence de Régulation des Télécommunications  en son article 3(1,3,4).

 

«  Au cas où vous pourriez éventuellement  envisager sa (Jean Louis Beh Mengue Ndlr) responsabilité, cela sera uniquement dans le cadre de la gestion. »

 

S’agissant de la rubrique intitulée fonds de souveraineté, la défense reconnait l’usage « ABUSIVE » de cette expression. « On aurait dû parler de fonds d’interventions spéciales. » Le Conseil de Jean Louis Beh Mengue dit avoir l’impression que l’accusation veut entretenir une confusion sémantique entre une irrégularité et un détournement.  A cet effet, il note que les fonds ont été prélevés dans la ligne budgétaire nommée « fonds de souveraineté ». Ce budget était autorisé par la tutelle financière, le Ministère des Finances. Pour s’en convaincre, il recourt aux dispositions de l’article 51 tiret 5 de la loi du 22 décembre 1999 portant statut général des entreprises publiques. En outre, Me Ndongo rappelle que le Conseil d’administration a chaque année approuvé le budget de l’ART par résolution. « La ligne avait une allocation de 25 millions Fcfa. L’accusation n’a pas rapporté la preuve de ce que les décaissements réalisés sur cette ligne étaient illégales. » Par conséquent,  « Matériellement parlant, il n’y a rien. » Il invite le Tribunal à garder à l’esprit l’élément intentionnel, un préalable en matière pénale.

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De plus, les plaidoiries de la défense s’articulent autour de la rubrique dénommée comice agropastoral. Pour le Conseil de Jean Louis Beh Mengue, le comice agropastoral était au Cameroun « l’événement du siècle », ce que  le président de la République a visité le stand de l’Art. « Pour nous, il y avait une urgence à prendre part à cet événement, avec une obligation de résultat. » Par ailleurs, il indique que la somme de  04 millions Fcfa a  servi au réaménagement des locaux de la représentation régionale de l’ART dans la région du Sud. Deux banquets ont été organisés pour un montant d’1 million Fcfa. Des  visites de « courtoisie » sont menées avec les autorités, «  au cours desquels on a offert des cadeaux. Le montant dépensé était insuffisant au point où le directeur général notre client a dû sortir à nouveau de l’argent de ses poches pour faire réussir cet événement. » Dans son développement, Me Ndongo dénonce l’attitude de l’accusation qui tend à transformer « les supposés fautes de gestion » en détournement. Ce qui suppose la fraude. Pour la défense,  il n’en n’est pas question : «  Au cas où vous pourriez éventuellement  envisager sa (Jean Louis Beh Mengue Ndlr) responsabilité, cela sera uniquement dans le cadre de la gestion. » Son confère, Me Assira parle des accusations « imaginaires » contre son client. « Soit le Ministère public est mal à l’aise dans ses accusations, et vous devez en tenir compte, soit, il est déloyal et vous devez également en tenir compte. » Les Avocats de Jean Louis Beh Mengue demandent au Tribunal d’acquitter leur client. A la suite des plaidoiries des Avocats de l’ancien directeur de l’ART, l’audience est suspendue. La suite de l’affaire est prévue le 15 octobre prochain. Il sera question pour les Avocats de dame Maryamou épouse Idrissou de plaider pour le compte de leur cliente.