Dieudonné Mah : « Monsieur Sollo avait tous les droits d'obtenir une avance sur salaire… »
Au soutien de sa déclaration, le directeur des Affaires administrative et financière à l’époque des faits, évoque les dispositions de l'article 73 des statuts du personnel de la CAMWATER. L’accusé répond ainsi aux questions posées par le représentant du Ministère public. Il est contre-interrogé le 11 juillet dernier au Tribunal criminel spécial (Tcs) de Yaoundé.
Par Florentin Ndatewouo
L’Avocat général :
N'existait-t-il pas une procédure comptable interne à la CAMWATER qui interdisait la sortie d'un montant de plus de 500 mille Fcfa pour le payement d'une même prestation ?
Dieudonné Mah:
Nous avons utilisé la loi de Finances 2006, modifiée en 2015 qui est supérieure à n'importe quel texte, de la CAMWATER, si jamais ce texte existait. La modification de cette loi en 2015 précise que le paiement des charges supérieures à 500 mille Fcfa est réintégré pour le calcul des résultats nets de l'entreprise. Cela ne veut pas dire que le paiement en espèces est interdit.
L'Avocat général :
En quoi consistait la logistique du travail que vous dites avoir financé ?
Dieudonné Mah :
Toutes les factures concernant cette logistique ont été versées au dossier.
L'Avocat général :
Combien de temps a duré le fonctionnement du groupe de travail ?
Dieudonné Mah:
02 ans quelques mois.
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L'Avocat général :
Le tribunal doit-il comprendre que ce sont les recensements ou les vérifications des points d'eau à l'administration publique qui auraient coûté la somme de plus d'un demi-milliard débloquée, soit 572 millions Fcfa ?
Dieudonné Mah:
En divisant 572 millions Fcfa par les 10 régions du Cameroun, nous trouvons une dépense de 57 millions 200 mille Fcfa par région. En divisant par département, on trouvera une moyenne d'01 million Fcfa. En divisant par arrondissement, on trouvera moins de 100 000 Fcfa. Ces chiffres étaient vraiment insuffisants pour exécuter ce vaste programme. Mais, on s'est débattu.
L'Avocat général :
Si ces fonds débloqués ont servi à financer la logistique, pour quelle (s) raison (s) les avez-vous fait enregistrer comme étant des perdiems payés aux participants ?
Dieudonné Mah:
Je n'ai jamais engagé au budget, et comptabilisé ces dépenses comme indemnités. Tous les bons d'engagement du paiement de ces frais de fonctionnement ne font pas allusion au paiement des indemnités, que la CAMWATER n'a jamais payé.
L'Avocat général :
Que répondez-vous aux membres du groupe de travail qui, entendu pour certains ici au tribunal, et d'autres à l'information judiciaire, ont déclaré n'avoir jamais rien perçu ?
Dieudonné Mah:
Je l'ai déjà dit, j'ai toujours payé les frais d'hébergement, de tous les membres du comité qui venaient à Douala. Vous pouvez le vérifier dans les archives de la CAMWATER ou chez les chefs de mission, notamment monsieur Ibrahim et Essomba du Ministère des Finances.
L’Avocat général :
Sur le déblocage indu de la somme de 96 millions Fcfa, au titre des avances sur salaire au profit de monsieur Jean William Sollo. Pour qu'elle raison avez-vous exécuté les décisions d'avance sur salaire, au profit de monsieur Jean William Sollo, qui était le directeur général, alors que le Conseil d'administration ne l'avait pas préalablement avalisé ?
Dieudonné Mah:
Je n'ai jamais consigné la décision concernant l'octroi d'avance sur salaire à monsieur Sollo. J'ai visé comme le chef de service du budget, le sous-directeur des ressources humaines, le sous-directeur comptable et financier.
Monsieur Sollo avait tous les droits d'obtenir une avance sur salaire, conformément à l'article 73 des statuts du personnel de la CAMWATER… Le Conseil d'administration n'a rien à y voir à ce niveau.
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C'est ce même Conseil d’administration qui a signé les Statuts qui demandent au Dg d'octroyer les avances sur salaire au personnel, y compris lui-même. Le Conseil n'a jamais dit « en dehors du directeur général. » Surtout que monsieur Sollo avait un contrat de travail.
____________Dieudonné Mah, accusé__________
L'Avocat général :
Trouvez-vous logique qu'un Dg d'une entreprise d'État puisse s'octroyer soi-même, des avantages, sans l'aval du Conseil d'administration ?
Dieudonné Mah:
C'est ce même Conseil d’administration qui a signé les Statuts qui demandent au Dg d'octroyer les avances sur salaire au personnel, y compris lui-même. Le Conseil n'a jamais dit « en dehors du directeur général. » Surtout que monsieur Sollo avait un contrat de travail.
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L'Avocat général :
Si tel est le cas, qu'est-ce qui empêcherait à un Dg de s'octroyer soi-même des sommes faramineuses... En d'autres termes, comment contrôlerait-on ou contrecarrerait-on un tel dérapage et à qui incomberait-il ?
Dieudonné Mah:
La somme de 96 millions Fcfa octroyée à monsieur Sollo n'était pas faramineuse dans la mesure où nous avons appliqué les textes de la CAMWATER qui disent qu'on ne peut pas octroyer un crédit à un employé sans tenir compte de sa quotité saisissable, qui est de 1/3 de son salaire. Monsieur Sollo a demandé une avance de 137 millions Fcfa, et sa quotité saisissable était de 96 millions Fcfa. C'est ce montant qu'on lui a accordé. Cela veut dire que la Daaf a fait son travail. Et nous disons merci à monsieur Sollo pour avoir accepté l'application des dispositions des textes de la CAMWATER.
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L’Avocat général :
En quoi consistait matériellement des prestations qu'auraient effectuées Koé Jean Parfait, Atangana Stanislas Victor, René Mbida?
Dieudonné Mah :
D'après les contrats signés avec les intéressés, il était question de recouvrer les fonds dus par le Minfi (Ministère des Finances, Ndlr) à la CAMWATER depuis 2008 jusqu'en 2015. Avant le recouvrement de ces cabinets, la CAMWATER a perçu du Minfi une somme d’01 milliard Fcfa, pendant 04 ans, et après le recouvrement, la CAMWATER a perçu une somme d'environ 65 milliards Fcfa. Voilà concrètement le travail effectué par ces consultants.
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L'Avocat Général :
Est-ce que ce n'était pas en raison de vos liens de parenté avoué avec René Mbida et Jean Parfait Koé que la CAMWATER était entrée en contact avec ces derniers en vie du recouvrement ?
Dieudonné Mah:
J'ai trouvé monsieur Mbida à la CAMWATER. Vous n'avez qu'à lire sa correspondance, qui accusait mon prédécesseur de n'avoir pas payé à temps ses créances. Cela veut dire que ce n'est pas moi qui ai amené monsieur Mbida à la CAMWATER. En ce qui concerne monsieur Koé, évidemment, c'est mon beau-frère. Il a effectué un travail de plus d'un milliard pour goudronner la route pour Nkolafamba. Lorsque j'ai vu qu'il a obtenu facilement un tel paiement au Minfi, je lui ai demandé s'il peut bien nous aider à la CAMWATER. Et c'est ce qui s'est passé.
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Contre-interrogatoire du 10 par Me Dominique Frousse, Avocate de la CAMWATER.
Me Dominique Frousse :
Avez-vous été convoqué devant le Conseil de discipline?
Dieudonné Mah:
Oui.
Me Dominique Frousse :
Pourquoi avez-vous été convoqué devant ce Conseil de discipline ?
Dieudonné Mah:
D'après la CAMWATER, j'ai payé les indemnités sans pièces justificatives pour le montant de 610 millions Fcfa.
Me Dominique Frousse :
Les pièces de décaissement ont-elles été jointes à la comptabilité ?
Dieudonné Mah:
Oui. Je les ai citées hier à la réponse posée par l'Avocat de monsieur Sollo.
Me Dominique Frousse :
Comment expliquez-vous qu'elles ne figurent pas au dossier de procédure si jamais elles avaient existé ?
Dieudonné Mah:
Cette histoire est vraiment absurde. Le contrôleur de gestion qui a audité la caisse était en possession de toutes ces pièces citées hier, y compris les mémoires de dépenses. C'est son incompétence et la volonté de me nuire qui a fait que je me retrouve ici devant le tribunal.
Me Dominique Frousse :
Savez qu'une plainte avait été déposée par la suite contre vous par monsieur Ondoua, puisqu'au terme de cet audit, aucune pièce n'avait été trouvée ?
Dieudonné Mah:
Oui. J'ai été convoqué à la police judiciaire au Tribunal criminel spécial (Tcs). J'ai remis tous les documents au corps spécialisé.
Me Dominique Frousse :
Comment expliquez-vous les variations dans vos dépositions?
Dieudonné Mah:
Je n'ai jamais dit que j'ai payé les indemnités. Ni à la police judiciaire, chez le juge d'instruction, encore moins ici. J'ai toujours dit que j'ai payé les frais de fonctionnement conformément à la décision du ministre des Finances. Ce sont les factures des frais de fonctionnement que j'ai produites en originaux ici.
Me Dominique Frousse :
A qui et comment les avez-vous payés ?
Dieudonné Mah:
Aux enquêteurs sur le terrain. Ils venaient décharger l'argent en espèce chez le trésorier du Comité.
Me Dominique Frousse :
Est-ce qu'il vous est possible de payer plus de 100 Fcfa à la caisse et est-ce légal ?
Dieudonné Mah:
La loi de Finances de 2006, valable jusqu'en 2015 n'a jamais interdit le paiement en espèces, quel que soit le montant. Et c'est cette loi que nous avons appliquée pour le paiement de ces frais de fonctionnement.
Me Dominique Frousse :
Avez-vous connaissance de la loi de Finances de 2011?
Dieudonné Mah :
La loi des Finances est très vaste. Au sujet des règlements des paiements, ça n'existe pas. Ça n'a jamais existé.
Me Dominique Frousse :
Comment pouvez-vous nous rapporter la preuve que monsieur Mbida était avec vous à « Alpha Fond » pour le premier décaissement ?
Dieudonné Mah:
Le directeur général d’Alpha Fond qui a eu l'Avc (accident vasculaire cérébral, Ndlr), devrait être mon témoin. Je me suis présenté devant lui avec monsieur Mbida et il nous a demandé d'aller faire décharger à monsieur Mbida à la CAMWATER, puisque le chèque portait le nom de la CAMWATER. Et c'est ce qui a été fait.
Me Dominique Frousse :
Pourquoi le chèque portait-il le nom de la CAMWATER, parce que vous êtes censé payer monsieur Mbida ?
Dieudonné Mah :
C'est monsieur Mbida qui est venu me dire dans mon bureau qu'il a arrangé avec monsieur Sollo, qu'il ne peut pas me démentir, puisqu'il a déclaré ici devant ce tribunal, que nous devons aller tous les deux à la banque.
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Monsieur Mbida se plaint et la vérité est ailleurs. Il a déchargé le solde de tout compte à la CAMWATER. Monsieur Onguene, témoin de l'accusation l'a déclaré ici. Il est allé plus loin en produisant le numéro de carte d'identité de monsieur Mbida. Lorsque monsieur Onguene l'a déclaré, pourquoi monsieur Mbida n'a rien dit s'il n'avait pas déchargé ces fonds ?
_________Dieudonné Mah, accusé __________
Me Dominique Frousse :
Est-ce légal ?
Monsieur Mah:
Oui. Le ministère des Finances, la Cnps (Caisse nationale de prévoyance sociale, Ndlr) la Csph (Caisse de stabilisation des prix des hydrocarbures, Ndlr) ont des comptes dans les micro-finances. Aucune loi n'interdit la CAMWATER de payer son personnel au travers des microfinances.
Dominique Frousse :
Pourquoi monsieur Mbida se plaint de n'avoir pas été payé ?
Dieudonné Mah :
Monsieur Mbida se plaint et la vérité est ailleurs. Il a déchargé le solde de tout compte à la CAMWATER. Monsieur Onguene, témoin de l'accusation l'a déclaré ici. Il est allé plus loin en produisant le numéro de carte d'identité de monsieur Mbida. Lorsque monsieur Onguene l'a déclaré, pourquoi monsieur Mbida n'a rien dit s'il n'avait pas déchargé ces fonds ?
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Me Dominique Frousse :
Pourquoi y a-t-il deux dates de signature de contrat : une du 10 juin 2014 et l'autre du 10 octobre 2014 de la CGS (CAMEROON GENERAL SERVICES, Ndlr)? Pourquoi avoir exécuté un contrat avant son enregistrement ?
Dieudonné Mah:
Je ne peux pas répondre à la première question étant donné que c'est le courrier du directeur général qui enregistre les documents.
Pour l'enregistrement, jee dirait que l'enregistrement a été effectué après les paiements. Il y a eu des paiements en 2015 et 2016. C'est le fournisseur qui s'occupe de cet enregistrement. On ne pouvait pas attendre surtout que la CAMWATER avait un besoin urgent des fonds. Monsieur Atangana Stanislas avait déjà viré de l'argent dans nos comptes.
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Me Dominique Frousse :
Quel montant monsieur Koé a-t-il recouvré au profit de la CAMWATER ?
Dieudonné Mah :
Monsieur Koé a recouvré la somme de 30 milliards Fcfa.
Me Dominique Frousse :
Monsieur Mah nous a dit que la Convention de dette croisée de 2012 a été signée en 2014, et payé selon échéancier prévues en 2015. Pourquoi alors avoir pris un agent de recouvrement ?
Dieudonné Mah:
Il s'agit de la Convention des dettes croisées signée le 29 avril 2014 concernant les créances des exercices 2012. A ce niveau, c'est grâce à monsieur Atangana Stanislas des établissements CGS que nous avons recouvré ces créances. Monsieur Atangana Stanislas m'avait accompagné chez le directeur général du trésor. C'est grâce à cette intervention que nous avons commencé à percevoir normalement les fonds. Ce qui ne se passait pas avant la signature du contrat. Vous pouvez voir le relevé du trésor que nous avons eu pour une première fois, le paiement de 6 milliards Fcfa, grâce à Atangana Stanislas. La trésorerie de l'État était très difficile avec la guère de boko Haram.
La prochaine audience est fixée au 22 juillet prochain.