Présomption de détournement de biens : 25 milliards 529 millions 473 mille 265 Fcfa, le montant cumulé du préjudice des marchés dits surfacturés selon l’accusation.

Présomption de détournement de biens : 25 milliards 529 millions 473 mille 265 Fcfa, le montant cumulé du préjudice des marchés dits surfacturés selon l’accusation.

Dans ses réquisitions intermédiaires de ce 10 mai devant le Tcs à Yaoundé, le Ministère public porte à 2 milliards 650 millions 777 mille 479 Fcfa, les pertes résultantes des marchés dits fictifs, exécutés en vue de l’acquisition du matériel militaire.  Ces défaillances sont mises à l’actif de l’accusé Edgard Alain Mebe Ngo’o et cie.

 

 

Par Florentin Ndatewouo  

 

A tour de rôle, Edgard Alain Mebe Ngo’o en premier et  ses coaccusés décident de déposer sous serment. Le choix de cette option est consécutif à la décision du Tribunal. Après avoir délibéré à la suite des réquisitions intermédiaires du Ministère public, la collégialité valide l’argumentaire développé par les représentants du Parquet général. Le Tribunal estime que les preuves sont suffisantes pour que les mis en cause présentent leurs défenses.

Au cours de ces réquisitions, les deux avocats généraux exposent nombre de griefs à l’encontre des accusés.

Il est reproché à Edgard Alain Mebe Ngo’o le chef de détournement de biens publics (Dbp), dans le cadre de ce que le Ministère public qualifie de « marchés surfacturés et marchés fictifs » Le montant cumulé des marchés dits surfacturés s’élève à 25 milliards 529 millions 473 mille 265 Fcfa.

  Le total du coût des  marchés dits fictifs est de 2 milliards 650 millions 777 mille 479 Fcfa. Le Ministère public impute ces pertes à sieur Mebe Ngo’o. Pour cause, « l’accusé Edgard Alain Mebe Ngo’o était responsable de s’assurer que le matériel commandé avait effectivement été  livré avant l’ordonnancement du paiement, et que le respect de la mercuriale des prix était effectif. » Ces marchés ont été passés durant la période allant de  2010 à 2015. Ce, entre le Ministère camerounais de la défense, à la tête duquel trônait Edgard Alain Mebe Ngo’o, et l’entreprise Magforce international, dont Robert Franchitti préside le conseil de surveillance.

Robert Franchitti, président du conseil de surveillance de l’entreprise Magforce international.

Au soutien de leurs déclarations, les avocats généraux convoquent les dispositions des articles 51 et 52 de la loi du 6 décembre 2007 portant régime financier de l’Etat. Ils recourent en outre à l’article 3 de la loi du 05 décembre 1974 relative au contrôle des ordonnateurs, gestionnaires et gérants des crédits publics et des entreprises d’Etat.

De plus, hormis l’infraction de détournement de biens publics, les accusés Mbangue Maxime Léonard, Mboutou Elle Ghislain, Menye Victor Emmanuel  répondent des faits de complicité de détournement de biens publics. Le montant du préjudice enregistré, imputé à sieur Mbangue est de 6 milliards 974 millions 266 mille 503 Fcfa. Les avocats généraux relèvent que cet accusé, en dépit de ces dénégations était « le point focal » en matière de gestion des finances  au Ministère de la Défense, depuis 2010, date de sa prise de fonction : « Il préparait les décisions de déblocage des fonds et les soumettaient à la signature du ministre Mebe Ngo’o. » A cet effet, le Ministère public estime qu’ « il est à la base des fautes ayant orchestrées les marchés fictifs et surfacturés. »

L’accusé Ghislain Mboutou a, aux dires du Ministère public pris le relais de son coaccusé Maxime Mbangue : « C’est lui qui présentait les projets de marché au ministre pour signature. »

 

 

« En ce qui concerne dame Minkoulou, épouse Mebe Ngo’o, Robert Franchitti a remis une somme de 500 000 euros en reconnaissance des marchés attribués par son mari à ce dernier. »

 

 

Au sujet de l’accusé Victor Emmanuel Menye, les représentants du Parquet général note que ; « c’est fort de sa maitrise de la pratique bancaire que Menye Victor a été à l’origine de l’ouverture de plusieurs comptes bancaires du ministre Mebe Ngo’o. » D’après le Ministère public, cet accusé informait le ministre de la mise à disposition des fonds par le ministre des Finances pour l’organisation de la fête du 20 mai : « la banque a servi de plaque tournante pour la gestion des détournements opérés par l’accusé Mebe Ngo’o. » Les avocats généraux mentionnent le virement bancaire  en date du 03 janvier 2014 , d’environ 500 millions Fcfa pendant la période d’1 mois. Victor Menye est à l’époque des faits sous-directeur de la Société camerounaise des Banques(Scb). Le Ministère public insiste sur l’implication de ce dernier dans les opérations de détournement : « en orientant Mebe Ngo’o vers cette banque, sieur Menye était conscient de l’emmener vers cette plateforme dont il maitrise les rouages. » En conséquence, « il ressort l’aide apporté par Victor Menye à Edgard Alain Mebe Ngo’o dans le détournement de biens publics. »

Par ailleurs, les mis en cause sont poursuivis pour l’infraction de corruption. « En ce qui concerne dame Minkoulou, épouse Mebe Ngo’o, Robert Franchitti a remis une somme de 500 000 euros en reconnaissance des marchés attribués par son mari à ce dernier. » L’accusé Maxime Mbangue aurait reconnu avoir reçu 30 à 40 mille euros à titre de gratification en provenance de sieur Franchitti. Ces gratifications lui ont été octroyées lors de ses différents séjours en France, relèvent les représentants du Parquet général.

L’accusé Edgard Alain Mebe n’aurait rien réclamé à l’entreprise Magforce international. Cependant, les confidences de Robert Franchitti au cours de son audition par les juridictions françaises disent le contraire. A  la question de savoir si ce dernier a versé des  rétrocommissions à Edgard Alain Mebe Ngo’o , Robert Franchitti répond : «Oui.  Des costumes, peut-être d’une valeur de 2000 euros environ, du champagne, du matériel de bureau… » A ajouter l’accusation.

Les accusés sont par ailleurs poursuivis pour les infractions de blanchiment (pour le cas de dame Mebe Ngo’o), et blanchiment aggravé de capitaux, à travers l’acquisition, la détention et l’utilisation desbiens immobiliers.