Consommation de drogue : L’accusation requiert la condamnation d’un prévenu.
A l’audience du 14 décembre au Tribunal de première Instance (Tpi) de Mbouda (région de l’Ouest), le Procureur de la République attire l’attention du Tribunal sur les risques encourus en cas de relaxe : « Si vous le déclarer non coupable, vous aurait perdu. Parce qu'il comprendra qu'il est habile, et cette fois, on ne sera plus dans la consommation, mais plutôt dans le trafic de drogue »
La consommation des stupéfiants est au goût du jour de l’actualité judiciaire à Mbouda (département des Bamboutos, région de l’Ouest Cameroun). Sieur Wamba a comparu hier 14 décembre devant le Tribunal de première instance (Tpi) L’accusation lui fait grief de la consommation du cannabis. Le représentant du Ministère public fait savoir que le mis en cause est interpellé le 01 novembre de l’année en cours au lieudit « Abattoir ». Ce jour, des Officiers de Police judiciaire (Opj) sont informés de l’existence d’un lieu dédié à la consommation de cette drogue. Sur la base de ce renseignement, les Opj se rendent sur les lieux, en civile. Dès leur arrivé, les occupants constatent leur présence. Ils prennent leurs jambes au cou. Sieur Wamba n’aura pas l’occasion de s’enfuir lui aussi.
Il est arrêté et conduit au Commissariat. Dans ses dépositions devant le tribunal, il justifie sa présence en ces lieux : « Je me suis rendu dans cette pièce pour rencontrer un certain Zapao, parce que j’avais un problème de téléphone portable. » La défense dit avoir été l’objet d’une agression quelques jours avant cet incident. Agression au cours de laquelle, elle s'est vue dépouiller de son appareil téléphonique.
En outre, au cours de son audition, elle dit avoir été surprise par la présence des officiers de Police judiciaire : « Pourquoi étiez-vous surpris de voir les policiers débarquer dans un lieu où les gens fument la drogue ? La consommation des stupéfiants est-elle normale ? » Ainsi, questionne le Procureur de la République : « j’étais surpris de constater que les Policiers sont arrivés dans la pièce juste quelques minutes après moi. Je pense que j’ai été dénoncé. » Un argument qui laisse de marbre le Procureur de la République.
Bien avant son contre-interrogatoire, représentant du Ministère public a procédé à la production des pièces à conviction. Lesdites pièces sont constituées des scellés. Elles contiennent des échantions de drogues retrouvées lors des fouilles, sur le corps du prévenu, aux dires de la demanderesse. Outre ces scellés, l'accusation présente le Procès-verbal d'audition de sieur Wamba, dressé au cours de l’enquête préliminaire. Ce, pour soutenir son accusation.
« Si vous le déclarer non coupable, vous aurait perdu. Parce qu'il comprendra qu'il est habile, et cette fois, on ne sera plus dans la consommation, mais plutôt dans le trafic de drogue », le Procureur de la République
Le prévenu conteste les déclarations contenues dans ledit Procès-verbal. « Les policiers ont retrouvé les drogues dans la pièce, à même le sol », prétend sieur Wamba. « Est-vous sûr de ce que vous dites ? Sachez que si vous mentez, nous pouvons faire venir ces policiers devant ce tribunal. Vous avez juré de dire la vérité», met en garde le président du Tribunal.
Prenant au pied de la lettre l’intervention du président du Tribunal, le représentant du Ministère public attire l’attention du prévenu sur la portée et l’implication de ses allégations : « Les officiers de police judiciaire n’ont pas d’immunité. Si vous estimé qu’ils vous ont imputé injustement les faits qui vous accablent devant ce tribunal, alors, je ferais ouvrir une enquête à leur encontre. Ils peuvent être révoqués pour cela. C’est une accusation grave. » Ensuite, le Procureur de la République se propose de faire venir les enquêteurs pour déposer : « Je suis prêt à demander un renvoi pour citer ces policiers à comparaitre. Vous avez le choix : Souhaiteriez-vous que l’on poursuive l’instruction de la cause, ou vous maintenez vos propos au sujet des policiers ? Dans ce cas, je les ferais venir ? » Sieur Wamba de se rétracter : « Je souhaite que l’on poursuive la cause. »
Le représentant du Ministère public requiert : « Vous exercez la Justice pour le peuple. Vous l'exercer avec sagesse. Vous savez qu'il ne faut pas verser l'eau du bain avec le bébé, à condition que l'on reconnaisse sa faute », déclame le Ministère public à l'attention du Tribunal.
L’accusation s’en prend ensuite à la défense : « Je vais un peu titiller le Conseil de cet accusé. Si ce monsieur vient me voir et je suis son Avocat, je vais dire : « j'ai fait ». La demanderesse de renchérir « Vous êtes étudiant et vous devez reconnaître que « j'ai eu à fumer. J'ai souvent des difficultés. » Les infractions sont comme des péchés. On pêche en pensées, en paroles, par action, et par omission. »
Le Procureur de la République requiert ensuite la condamnation de sieur Wamba : « Si vous le déclarer non coupable, vous aurait perdu. » Motif ? « Parce qu'il comprendra qu'il est habile et cette fois-on ne sera plus dans la consommation-mais plutôt dans le trafic de drogue », redoute l’accusation.
« Je présente au Tribunal mes excuses. »Dixit sieur Wamba, le prévenu.
Dans ses dépositions, sieur wamba avoue avoir déjà consommé la drogue, longtemps avant son arrestation dans le cadre de la présente cause. Cependant, il dit avoir mis un terme à cette pratique.
« Monsieur le président, vous êtes en charge des libertés.
(…) Libérez cet enfant si on ne vous a pas donné les preuves qui vous permettent de le maintenir. Ne brisez pas son rêve. Il m'a dit ce matin, qu’il voudrait être Magistrat », réagit le défenseur du prévenu. « Monsieur le président, la particularité des intellectuels est qu’ils sont curieux. Cet enfant a eu son Baccalauréat à 18 ans. Il a vu les gens fumer du cannabis. Il a dit « je vais aussi fumer. » Lorsqu'il fume, il se rend compte qu'il n'y a rien dedans, il décide d'arrêter. »
Pour amener le président du Tribunal à adhérer à sa cause, le Conseil de sieur Wamba fait feu de tous bois. A cet effet, il essaye d’établir les liens de similarité entre son propre passé, et celui de son client : « Moi aussi, j'ai eu à fumer dans ma jeunesse. J'ai dû arrêter parce que cela ne me procurait rien. Pour autant, dois-je être condamné pour mon passé ? Nous avons tous un passé pas très reluisant. »
Invité à faire ses dernières déclarations, sieur Wamba fait amende honorable : « Je présente au Tribunal mes excuses. »
La consommation de stupéfiants est une infraction prévue et réprimée par l'article 74 de la loi du 12 juillet 2016 portant code pénal, et l'article 102(1) de la loi du 07 août 1997 relative au contrôle des stupéfiants, des substances psychotropes et des précurseurs et à l'extradition et à l'entraide judiciaire en matière de trafic des stupéfiants, des substances psychotropes et des précurseurs.
L’affaire est mise en délibérée pour le 23 décembre prochain.