Complicité du détournement présumé: Bernadette Mebe Ngo’o entendue sur la somme de 05 milliards 237 millions
L’accusation reproche à l’épouse de l’ancien ministre délégué à la Présidence chargé de la Défense, la mise à disposition des documents de la société limousine prestige services, dont elle est la promotrice. Ce qui a facilité la distraction des fonds querellés. L’accusée est intorrogée par ses Avocats le 25 octobre de l’année en cours, au Tribunal criminel spécial à Yaoundé.
Par Florentin Ndatewouo
Bernadette Minla Nkoulou dit ne pas se reconnaitre dans les faits qui lui sont reprochés. L’épouse d’Edgard Alain Mebe Ngo’o, ancien ministre délégué à la Présidence chargé de la Défense (Mindef) est auditionnée pour la première fois le 25 octobre de l’année en cours à Yaoundé. Devant les membres de la collégialité du Tribunal criminel spécial (Tcs), elle répond des faits présumés de complicité de détournement de biens publics (Dpb), complicité de corruption, et de blanchiment aggravé de capitaux.
Le montant querellé relatif à l’infraction présumée de Dbp en complicité s’élève à 05 milliards 237 millions 375 mille 765 Fcfa, « soit 03 milliards 562 millions 373 mille 565Fcfa, au titre de 04 marchés spéciaux, payés à Magforce international, auxquels l'accusation a ajouté la somme d'01 milliard 675 millions FCFA de deux décisions de déblocage de fonds le 24 mars 2013 et le 20 mars 2015. » Me Amougou Koé Pauline d’interroger sa cliente : « Qu'avez-vous à dire au Tribunal par rapport à ces 03 chefs d'accusation ? »
Vêtue d’une tunique de couleur vert éclatante, connue sous le vocable « Kaba », dame Minla Nkoulou, l’air étonnée déclare : « Madame la Présidente, honorable membre de la collégialité, je ne me reconnais pas dans ces accusations. »
Débout dans le box des témoins, dame Mebe Ngo’o joue la carte de la sérénité. En témoigne l’assurance avec laquelle elle s’exprime devant le Tribunal. Le ton quelque fois émotif que l’on perçoit à travers son timbre vocal, balance avec la lenteur de son débit.
L’infraction de détournement de biens publics en complicité, mis à la charge de Bernadette Minla Nkoulou par l’accusation porte sur 04 marchés publics. Il s’agit notamment :
- du marché quotté R1775 du 25 mars 2010, d'un montant de 405 millions 050 mille Fcfa. Ce marché est attribué à la société Magforce international. De l’avis de Me Koé, il porte la signature de l'actuel ministre d'État, ministre de la Justice garde des sceaux, Laurent Esso, en sa qualité de ministre Secrétaire général de la Présidence de la République (Sgpr), à l'époque des faits ;
-Le marché quotté R1780 du 26 mars 2012, d’un montant de 958 millions 103 mille 301 Fcfa. Il est réglé au profit de Magforce international, et signé de l'actuel ministre d'État, Sgpr, monsieur Ngoh Ngoh Ferdinand, ex-qualité de Sgpr à l'époque des faits ;
-Le marché R1781 daté du 13 mars 2013, d'un montant d'01 milliard 249 millions 197 mille 981Fcfa, réglé au profit de Magforce international, et signé de monsieur Ngoh Ngoh Ferdinand, actuel Sgpr.
« Comment je pouvais mettre la main sur ces milliards ? »
L’accusation reproche à l’accusée Bernadette Minla Nkoulou, la mise à disposition des documents administratifs de la société Limousine prestige services, dont elle est la promotrice, à la société Magforce international. Ceci, dans le but de « faciliter » la perception des fonds générés dans le cadre desdits marchés spéciaux. « C'est vraiment de la magie ! » Ainsi, réagit l’accusée, non sans s’interroger : « Comment une société comme limousine prestige peut mettre ses documents administratifs à la disposition de Magforce international et se faire payer en lieux et place de cette dernière ? Ces documents administratifs sont où ? Ont-ils été produits par l'accusation et admis comme preuve par le tribunal ? Je m'interroge avec quel pouvoir et quel moyen je peux influer sur ces marchés ? » A l’appui de cette déclaration, Bernadette Minla Nkoulou épouse Mebe Ngo’o dit n’avoir pas eu connaissance de l’existence d’une relation contractuelle entre son épouse, Mindef d’alors, et la société Magforce international, comme le soutient l’accusation : « j'ignorais que mon époux avait une relation contractuelle avec Magforce international. » A l’écoute de cette déposition, Edgard Alain Mebe Ngo’o, assis au premier banc des accusés, mitoyen du box des témoins, détourne son regard, jadis fixé sur les membres de la collégialité. Il l’oriente ensuite vers son épouse. Cette dernière est interpellée sur son implication éventuelle dans le traitement des marchés querellés. « Qui suis-je pour attribuer un marché à qui que ce soit au Mindef ? Le traiter, encore moins le payer ? » Bernadette Mebe Ngo’o fait savoir qu’elle ne disposait ni des « attributions », ni des « moyens » de donner des instructions à qui que ce soit. Question : « Comment je pouvais mettre la main sur ces milliards ? » L’accusée soutient que « La provocation ou l'aide de ma part pour la commission de cette infraction sont tout simplement impossibles », va-t-elle marteler.
La suite de l’interrogatoire principal de dame Mebe Ngo’o est prévue le 31 octobre prochain. L’épouse de l’Ex-ministre délégué à la Présidence chargé de la Défense est la dernière des accusées à être entendue. Son audition suit respectivement celle de Victor Emmanuel Menye, Ghislain Mboutou Elle, Léonard Maxime Mbangue. Dans le cadre de cette procédure, le principal accusé, Edgard Alain Mebe Ngo’o a ouvert le bal des interrogatoires.