Affaire Edgard Alain Mebe Ngo’o et cie : Les avocats des accusés estiment que le Parquet prend en otage le Tribunal.

Ils dénoncent les lenteurs observées dans la production des pièces à conviction. Pour sa part, le Ministère public dit être sensible et note des contraintes liées à la stratégie.
Par Florentin Ndatewouo
La patience a visiblement atteint ses limites. Les avocats des accusés n’en peuvent plus : « Pendant combien de temps allons-nous encore subir cela ? Aujourd’hui nous sommes aux bancs des accusés. Demain, la situation peut s’inverser et j’espère que ceux d’en face aimeraient être traités de la manière dont nous le sommes en ce moment. » Me Claude Assira s’indigne au cours de l’audience tenu ce 30 avril au Tribunal criminel spécial (Tcs) de Yaoundé. « Nous ne comprenons pas pourquoi il faut saucissonner les pièces et les présenter comme vous le faites. » Le défenseur de l’accusé Maxime Mbangue dénonce les lenteurs relatives à la procédure en cours. Lenteurs mises à l’actif du Parquet.
Me Ntamack Sylvie n’attendra pas que la parole lui soit donnée pour exprimer elle-aussi son désarroi. L’une des avocates du couple Mebe Ngo’o se lève de son siège à l’improviste, et martèle : « Nous notons que le Ministère public a pris en otage le Tribunal ! »
Le représentant du parquet général ne laisse pas pisser les mérinos. Dans une démarche conciliante, l’un des avocats généraux explique : « Nous ne sommes pas insensibles à ce qui se passe dans ce tribunal. Nous prions la défense de comprendre que par rapport à la stratégie mise en place, il y a des contraintes. » Me Amougou Koue, avocate du couple Mebe Ngo’o ne l’entend pas de cette oreille. Séance tenante, elle convoque les dispositions de l’article 10 (5) de la loi du 14 décembre 2011 portant création du Tcs. Ensuite, elle souligne que « ce Tribunal a déjà violé ses propres lois ». Ledit article dispose : « (5) Cette juridiction dispose d’un délai de six (06) mois pour rendre sa décision. Ce délai peut être prorogé de trois (03) mois par ordonnance du Président du Tribunal saisi. »
L’avocat général rassure sur le fait qu’ « Avant la fin du mois de mai, la parole sera donnée aux accusés. »
Ces échanges sont consécutifs à la présentation par le Ministère public des pièces à conviction. Il s’agit de
-la Commission rogatoire délivrée par le juge d’instruction du Tribunal criminel spécial, en vue d’une perquisition au domicile de l’accusé sieur Mboutou Elle Ghislain à Yaoundé ;
-le procès-verbal du transport sur les lieux et les perquisitions subséquentes ;
-la commission rogatoire en vue de la perquisition de sieur Mboutou à son domicile de Sangmelima (région du Sud) ;
-le plan photographique réalisé à cette occasion. Les mêmes pièces ont été présentées au sujet de l’accusé Maxime Mbangue.
L’audience a été suspendue à la suite des différentes prises de parole. Le procès reprendra le 03 mai prochain. Il sera question pour le Ministère public de poursuivre avec la production des pièces à conviction. Dans le cadre de cette affaire, le Ministère public et l’Etat du Cameroun (Ministère des Finances (Minfi) ont engagé des poursuites à l’encontre de Mebe Ngo’o Edgard Alain Abraham, Mbangue Maxime, Mboutou Elle Ghislain, Menye Victor Emmanuel, Minla Nkoulou Bernadette épouse Mebe Ngo’o. Ils répondent des faits de corruption, détournement de biens publics (Dbp), violation code des marchés, prise d’intérêt dans un acte, blanchiment aggravé des capitaux, complicité de Dbp.