Coaction de détournement de biens publics : Jean William Sollo écope de 15 ans de prison

L’ancien directeur de la CAMEROON WATER UTILITIES COORPORATION (CAMWATER) est contraint au versement solidaire de la somme de 85 millions 875 Fcfa à la partie civile. Sa coaccusée, dame Ngambi Sidonie est condamnée à l’emprisonnement à vie.
Par Florentin Ndatewouo
Le séjour de Jean William Sollo Eugène Gabriel à la prison de Kondengui se prolonge. L’ancien directeur général de l’entreprise publique CAMEROON WATER UTILITIES COORPORATION (CAMWATER) est reconnu coupable des faits de détournement de biens publics en coaction avec l’accusée dame Ngambi Sidonie Christelle Appolin : « Le tribunal, après avoir délibéré conformément à la loi… déclare les accusés Sollo Jean William et dame Ngambi Sidonie Appolin coupables de coaction de détournement de biens publics de la somme de 87 millions Fcfa. »
A l’audience de ce 14 juin au Tribunal criminel spécial (Tcs) à Yaoundé, Jean William Sollo écope de 15 ans d’emprisonnement ferme. En conséquence, un mandat d'incarcération est décerné à son encontre.
Dans le même sillage, le tribunal inflige à l’accusé une peine pécuniaire à titre de dommages et intérêts. Jean William Sollo est soumis au paiement solidaire de la somme de 85 millions 875 Fcfa. A cela s’ajoute les dépens à hauteur de 4 millions 824 mille Fcfa.
En outre, les déchéances prévues par l’article 30 du Code pénal sont prononcées à l’encontre la défense. Celles-ci équivalent à la durée de la peine d’emprisonnement. La publication de la décision dans le journal d’annonces Cameroon Tribune est mise à la charge de la partie défenderesse.
Par ailleurs, les accusés sont déclarés non coupable du chef de détournement de biens publics en coaction de la sommes de 42 millions 382 mille Fcfa.
« L'accusé ne saurait évoquer un contrat de partenariat ni un mémorandum d'entente qui n'a aucune valeur juridique pour justifier la sortie des fonds au profit des sociétés appartenant à Ngambi Sidonie. » Le Tribunal
L’accusée dame Ngambi Sidonie Christelle Appolin n’a pas comparu devant la juridiction de jugement du Tcs. La directrice des sociétés Alima Obama Solution s’est enfuie, après avoir été entendue au cours de l’enquête préliminaire. Elle est reconnue coupable des faits qui lui sont reprochés. Ainsi, Sidonie Christelle Appolin écope de la peine d’emprisonnement à vie.
La déclaration de culpabilité de Jean William Sollo et Ngambi Sidonie Christelle Appolin est motivée par divers arguments.
En effet, dans le cadre de ce procès, l’accusation fait grief à Jean William Sollo d’avoir ordonné en sa qualité de directeur général de la CAMWATER, la sortie des fonds au profit de Ngambi Christelle Sidonie Appolin. Le décaissement des montants querellés s’est fait en « l’absence » d’une contrepartie » du travail effectué. « L'accusé ne saurait évoquer un contrat de partenariat ni un mémorandum d'entente qui n'a aucune valeur juridique pour justifier la sortie des fonds au profit des sociétés appartenant à Ngambi Sidonie. »
Le Tribunal dénonce la violation par la défense, des dispositions de l’article 2 de la loi du 29 décembre 2006, portant régime général des contrats de partenariat. L’alinéa 2 de cet article dispose : « Le contrat de partenariat est un contrat par lequel l’Etat ou l’un de ses démembrements confie à un tiers, pour une période déterminée, en fonction de la durée d’amortissement des investissements ou des modalités de financements retenus, la responsabilité de tout ou partie des phases suivantes d’un projet d’investissement :
-le financement ;
-la construction ;
-la transformation des ouvrages ou équipements ;
-l’entretien ou la maintenance ;
-l’exploitation ou la gestion. »
« Aucune convention honoraire de 12 millions 500 Fcfa n'a été produit au débat entre la CAMWATER et dame Ngambi Sidonie», le Tribunal
Le défaut du bon de commande ou le marché de gré à gré, signé par le ministre des marchés publics conforte la collégialité dans cette posture. Pour le tribunal, l’option du déblocage des fonds au profit de dame Ngambi est contraire aux dispositions de l'article 28 du décret du 24 septembre 2004 portant code des marchés publics, en vigueur à l’époque des faits. L’examen de l'historique des comptes bancaires de la CAMWATER fait ressortir les virements par sieur Sollo au profit de Ngambi Sidonie des sommes mis à leurs charges par l’accusation. « Aucune convention honoraire de 12 millions 500 Fcfa n'a été produit au débat entre la CAMWATER et dame Ngambi Sidonie», a-t-il déploré.
Le Tribunal évoque une « entente préalable » des accusés. Ce, à travers la création des entreprises fictifs par les soins de dame Ngambi Sidonie, suivi de l'inscription de ces entreprises dans le fichier de la CAMWATER. Des entreprises appartenant à cette dernière possèdent le même numéro d’identification.
Pour le Tribunal, l’infraction de coaction de détournement de biens publics est caractérisée. Ce, eu égard à l’existence cumulée des éléments intentionnel, matériel, légal. A cet effet, les accusés sont condamnés suivant les dispositions des articles 74, 96 et 184 (1a) de la loi du 12 juillet portant code pénal.
Bien avant les délibérations, le Ministère public prend la parole, suite à la déclaration de culpabilité. Le représentant du Parquet général près le Tcs requiert pour la confiscation au bénéfice de l’Etat du Cameroun des soldes des comptes bancaires appartenant à dame Ngambi. Cette mesure s’ajoute aux peines privatives de liberté et pécuniaires donc la demande a été formulée au préalable par Me Albert Oyié, Avocat de la partie civile.
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La défense a quant à elle plaidé et obtenu les circonstances atténuantes, en raison de la qualité de « délinquant primaire » de l’accusé. Jean William Sollo s’est inscrit dans la même mouvance, implorant « la clémence du Tribunal ».
Jean William Sollo est détenu à la prison centrale de Yaoundé Kondengui depuis le 19 février 2019. Il y a déjà séjourné pendant 04 ans. Cette durée de détention provisoire sera déduite de la peine de 15 ans de prison à lui infligé par le tribunal, conformément aux dispositions de l’article 53 du code pénal. Ce qui ramène à 11 ans, la durée de détention provisoire restante.