François Onguené : « La dette croisée portait sur la solvabilité de la CAMWATER. »

François Onguené : « La dette croisée portait sur la solvabilité de la CAMWATER. »

Le témoin de l’accusation répond aux questions posées l’Avocat de l’ancien directeur général de cette société, l’accusé, Jean William Sollo. Il est contre-interrogé par Me Lema Ngono, à l’audience du 01er novembre de l’année en cours, au Tribunal criminel spécial à Yaoundé.

Par Florentin Ndatewouo

 

 

Me Lema Ngono :
Pouvez-vous dire au tribunal combien de conventions de dette croisée ont été signées courant 2012-2016 entre l'État du Cameroun, représenté par le Minfi (Ministère des Finances, Ndlr), la Cde (Camerounaise des Eaux, Ndlr) et la CAMWATER (CAMEROON WATER UTIITIES CORPORATION, Ndlr) ?

François Onguené :

Je n’ai pas de réponse à cette question.

 

Me Lema Ngono :
Aviez-vous eu connaissance de cette convention de dette croisée ?

 

François Onguené :

Oui

Me Lema Ngono :
Pouvez-vous indiquer à ce tribunal quel en était l'objet ? 

 

François Onguené :
La dette croisée portait sur la solvabilité de la CAMWATER. Pour répondre aux remboursements des dettes de l'État rétrocéder à la CAMWATER, les administrations, à travers le Minfi, font une réclamation des créances de la CAMWATER. Lesquelles seront reversées à la Caisse autonome d'amortissement (Caa), garant des remboursements auprès des bailleurs de fonds. La CAMWATER et la Cde vont donc s'établir des dettes réciproques. Une fois les dettes établies, elles sont remontées au Minfi pour la répartition de la créance facturée par la Cde aux administrations. Après cette répartition, le Minfi retient dans la quote-part revenant à la CAMWATER, les prêts payés en échéance par la Caisse autonome d'amortissement et le reliquat si possible, est viré dans les comptes de la CAMWATER à échéance. Voilà le processus de la dette croisée. 

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Me Lema Ngono :
Pouvez-vous indiquer au tribunal, qu'elles étaient les ressources financières de la CAMWATER ?

François Onguené :
Il y a la  dette réciproque au besoin de solvabilité à long terme. A court terme, la CAMWATER encaissait des redevances de la Cde et des particuliers. On peut repartir ces ressources en deux parties : les gros consommateurs et les particuliers pour la solvabilité à court terme, et la solvabilité à long terme, qui porte sur la redevance des administrations. 

 

Me Lema Ngono :
Pouvez-vous dire au tribunal si avant la signature de cette convention, la Cde versait régulièrement les redevances dues à la CAMWATER ?

 

François Onguené :
La part des gros consommateurs et des particuliers étaient versée régulièrement. Mais, la part des administrations, supportée par le Minfi, était versée par accout par la Cde…

 

Me Lema Ngono :
S'agissant de la part des administrations, objet des dettes croisées, le Minfi devait-il payer directement les redevances dues par la Cde à cette dernière, ou à la CAMWATER ?

 

François Onguené :
C'est la Cde qui facture aux administrations et particuliers, et la CAMWATER à son tour, facture à la Cde pour sa redevance, au regard du contrat de concession signé entre l'État et la CAMWATER.

Il faut retenir ici l'élément historique engrangé par la guerre au nord. Ce qui va réduire les ressources du Minfi qui n'aura plus les moyens de payer la dette de la Cde à échéance. C'est de là qu'entre en jeu la dette croisée. L'enjeu est donc la date de paiement…


Me Lema Ngono :
Est-ce que la CAMWATER avait quelque chose à payer à la Cde?

François Onguené :

Non. Il faut au préalable une dette croisée entre la Cde et la CAMWATER. 

Me Lema Ngono : 
Confirmer-vous que le reliquat à payer par le Minfi devait être directement reversé à la CAMWATER ?


François Onguené :
Le reliquat se reverse par subrogation à la CAMWATER. C'est-à-dire que l'Etat se substitue à la Cde, saisit la créance et reverse à la CAMWATER. 

 

Me Lema Ngono :
En votre qualité de sous-directeur comptable  et financier, étiez-vous au courant que l'Afd (Agence française de Développement, Ndlr) avait suspendu ses financements pour divers projets au profit de la CAMWATER, courant 2012, 2013?

 

François Onguené :

Oui.

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Me Lema Ngono :

A cette période, est-ce que la CAMWATER remboursait ses dettes des bailleurs de fonds de la Caa?

 

 


François Onguené :
Oui, la CAMWATER remboursait régulièrement et à échéance sa dette envers les bailleurs de fonds, par l'entremise de la Caisse autonome d'amortissement.

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Me Lema Ngono :
La CAMWATER pouvait-elle effectuer ses investissements sur fonds propres durant cette même période ?

 

François Onguené :
Les états financiers déterminent les investissements de la CAMWATER sur fond, la part de l'Etat au contrat plan qui portait sur 25 milliards FCFA. 


Me Lema Ngono :

Au mois de décembre 2015, quel était le montant de l'état des créances de la CAMWATER sur la base des conventions des dettes croisées ?

 

François Onguené :

Cette question revient au manager. 

 

Me Lema Ngono : 
Ces conventions prévoyaient-elle des échéances de paiement ?

 

François Onguené :
C'était un moyen pour le Minfi de régulariser sa trésorerie.

 

Me Lema Ngono :
Pouvez-vous dire si l'Etat a respecté ces échéances aux dates convenues ?

 

François Onguené :
Non. Mais, l'État est solvable même en période de guerre. On ne peut donc pas parler des créances douteuses, ce qui explique les lenteurs de paiement.

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Me Lema Ngono :
Vous avez évoqué tout à l'heure, une schématisation relative aux facturations adressées au Minfi. Est-ce que, sur la base de cette schématisation, les créances à payer par le  Minfi à la CAMWATER  étaient régulières ou non. 

François Onguene :
Ce ne sont pas des créances régulières ou irrégulières. Ce sont des créances spéciales qui permettent à la fois de hisser la dette par rétrocession de la Caa et stabiliser la trésorerie de la CAMWATER. 

 

Me Lema Ngono :
Le Minfi s'étant substitué à la Cde, est-ce que les redevances dont agit constituaient les créances dues à la CAMWATER ?

 

François Onguené :
C'est le schéma normal.

 

Me Lema Ngono :
En cas de non-respect des échéanciers par le Minfi, est-ce que  lesdites conventions prévoyaient un règlement à l'amiable ou une conciliation ?
 

François Onguené :
Lorsque le Minfi se subroge à la dette, il a la bonne volonté. Les conventions à l'amiable sont signées.

Me Lema Ngono :
Est-ce que la CAMWATER avait le droit d'engager les procédures contentieuses contre l'État du Cameroun sur la base des dispositions de cette convention ?


François Onguené :
 A partir du contrat que Me a lu, je ne l'ai pas lu.