Affaire Martinez Zogo : Le film de l’enlèvement du journaliste.

Sep 24, 2025 - 22:00
Sep 25, 2025 - 05:20
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Affaire Martinez Zogo : Le film de l’enlèvement du journaliste.

Aux dires des témoins oculaires, l’infortuné, serait à la recherche désespérée d’un refuge. Ainsi, dans sa course folle, il percute violemment le portail du poste de Brigade de Gendarmerie de Nkol-Kondi par Soa. Une fois sorti de son  véhicule-il émet en vain-des cris de détresse. Sieur Zogo sera malheureusement capturé par ses bourreaux, en l’espace de 05 minutes seulement. Ceci, après avoir reçu une décharge électrique, visant à vaincre toute forme de résistance.

 

Par Florentin Ndatewouo

05 minutes. Le temps nécessaire pour procéder à l’enlèvement de feu Martinez Zogo : « Un véhicule de marque Yaris, couleur grise a percuté le mur de la Gendarmerie. Un monsieur (Martinez Zogo, Ndlr) est sorti de l’intérieur. Il a crié « O secours O secours, ils veulent me tuer. » Un autre véhicule de marque Prado, couleur noir qui le suivait était placé à l’arrière, après avoir heurté la Yaris. » Sandra Makuété vit la scène, depuis le bar de sa mère, le 17 janvier 2023, aux environs de 21h. Cette buvette est située en face du poste de brigade de la Gendarmerie de Nkol-Kondi par Soa : « Quatre personnes sont sorties de cette prado. Parmi eux, 03 étaient habillées en costumes noirs, et le quatrième en jogging bleu. Ils ont arrêté le monsieur. A l’aide d’un objet, ils lui ont pointé une décharge électrique au cou. Le monsieur s’est affaibli et ils l’ont ramené dans leur véhicule  et se sont enfuis… » Sandra Makuété, 19 ans,  dépose ainsi à l’audience du 22 septembre dernier, au Tribunal militaire de Yaoundé.  Cette déposition est suivie de celle de James Fredie Minlo.

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En date du 17 janvier 2023, ce maréchal de logis chef est désigné pour assurer le service avec son collègue. « Au cours de la journée, nous avons reçu les usagers et les avons orientés conformément à leurs différentes préoccupations. A 19h, nous avons fermé les portes. Aux environs de 21h30-21h45min, nous entendons un grand bruit... Comme une explosion. » Sieur Minlo dit être frappé à l’instant, d’un sentiment de stupéfaction... Avec son collègue, ils sont désormais sur le qui-vive : «  Nous nous sommes planqués pendant environ 05 minutes. Quelques temps après, je m’avance en bons. Ensuite, je sors pour m'enquérir de la situation. »

 

 

 

 

 

 

 

« Le pare-prise est complétement détruit avec plusieurs impacts à l’arrière, laissant penser qu’il a été heurté à plusieurs reprises… » Le rapport d’enquête.

 

 

 

 

 

 

 

Rendu à l’extérieure du bâtiment abritant les services du poste de la Brigade, sieur Minlo constate : « La portière du véhicule de marque Yaris est ouverte du côté chauffeur. » Son supérieur, le sous-lieutenant Yunishe Elinge Mbusa lui donne instruction de procéder à la fouille du véhicule. Il s’exécute et effectue une fouille sommaire. Objectif ? : « La fouille sommaire avait pour but de déterminer le propriétaire du véhicule », explique-t-il.

Le véhicule est conduit dans l’enceinte de la Brigade après cette opération. Il est  immatriculé LT424FV. D’après le rapport d’enquête, « le pare-prise est complétement détruit avec plusieurs impacts à l’arrière, laissant penser qu’il a été heurté à plusieurs reprises… »

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La fouille sommaire permet de découvrir dans le véhicule de Martinez Zogo, la présence d’un "petit" téléphone  portable de marque tecno, ainsi qu'un "petit" poste radio, à proximité des pédales du véhicule. « Le lendemain aux environs de 06h30, je procède à la fouille approfondie. Je découvre un document qui avait l'aspect d'un mémoire, avec une chemise de couleur rose en dessous du siège avant. » Le maréchal logis chef Fredie James Minlo est loin d’envisager l’hypothèse d’un enlèvement : «  A ce moment précis, nous ne pouvions pas nous imaginer qu'il s'agissait d'un enlèvement. La 1ère idée qui me vient à l'esprit, lorsque je sors, je trouve  le véhicule, je me dit que le propriétaire a heurté le portail, a pris peur et s'est enfuit. Je commence donc à chercher le propriétaire. » Sieur Minlo affirme avoir procédé par la suite,  à l'audition des conducteurs de motocycles, ayant vécus la scène. « Les motomans interrogés nous ont dit que la scène a duré 05 minutes. »

Le maréchal de Logis chef se veut rassurant:«Aucune autre personne, en dehors de mes collègues, ne s'est introduite dans l'enceinte de la Brigade au soir du 17 janvier 2023, après la fouille sommaire.»

 

 

 

 

 

 

 

 

« Il (Justin Danwé, Ndlr) s’est rendu dans mon bureau. Il m’a dit : « Il y a un journaliste qui parle mal de mon chef. Je voudrais que vous lui infligé une bonne correction », confie sieur Ngambi.

 

 

 

 

 

 

 

A la question de savoir si le poste de Brigade de Gendarmerie de Nkol-kondi ne disposait-t-il pas de caméras de surveillance, le témoin se veut nuancé : « Il y a des caméras à l'extérieur, mais elles ne fonctionnent pas. »

La veille de cette audience, deux autres témoins ont été auditionnés. Au cours de son interrogatoire, le sous-lieutenant, Legand Ngambi, a épilogué sur ses échanges avec l’un des accusés.

 Il affirme avoir eu une rencontre physique unique avec Justin Danwé. A cette rencontre s’ajoute une série de conversations menées par voie numérique. Ces échanges sont intervenus notamment les 02, 03, 05, 08, 10, 11 et 17 janvier 2023.

A l’époque des faits, le sous-lieutenant Ngambi Legrand exerce en qualité de chef de poste de police au lieudit « post centrale de Yaoundé ». Il dit avoir été contacté par Justin Danwé : « Il (Justin Danwé, Ndlr) s’est rendu dans mon bureau. Il m’a dit : « Il y a un journaliste qui parle mal de mon chef. Je voudrais que vous lui infligiez une bonne correction », confie sieur Ngambi.

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Le 03 janvier 2023, le sous-lieutenant Ngambi reçoit un message de sieur Danwé. Ce dernier lui demande de mobiliser une équipe de « gros bras », à l’effet de mettre en exécution, son plan de « correction ». Mais avant, il tient à prendre des mesures de précaution : « Déjà au bureau ? Discrétion absolue. Ne donnez aucune information à vos collaborateurs. Donnez une bonne correction à la cible. J’ai appris qu’il habite à Tsinga. » Le sous-lieutenant colonel Ngambi Legrand fait ainsi lecture du contenu de ses échanges effectués à travers le réseau social « Whatsapp », avec Justin Danwé : « Comment vont les préparatifs ? La pression de la mission est-elle jouable ? » Sieur Danwé s’enquiert ainsi de la situation le 08 janvier 2025.

Il importe de noter que Justin Danwe est lieutenant colonel. Il occupe à l'époque des faits, le poste de directeur des opérations, à la Direction générale de la Recherche extérieure (Dgre)

 

 

 

 

 

 

 

« Bonsoir mon adjudant-chef. Le dossier dont je vous ai parlé ne vous intéresse plus. La police s’en est chargée. Effacez nos conversations», l’accusé Justin Danwé.

 

 

 

 

 

En outre, le sous-lieutenant Ngambi dit avoir été préoccupé par les préparatifs relatifs à la célébration de sa décoration. Ce dernier est nommé adjudant-chef le 10 janvier 2023. « Justin Danwé était invité à cette fête. Malheureusement, il n’est pas venu. Je me suis dit qu’il devrait être occupé, qu’il avait une mission », confie sieur Ngambi. Il est une fois de plus contacté par Justin Danwé le 17 janvier, jour de l’assassinat de Martinez Zogo : « Bonsoir mon adjudant-chef. Le dossier dont je vous ai parlé ne vous intéresse plus. La police s’en est chargée. Effacez nos conversations», recommande Justin Danwé.

Le 22  du même mois, sieur Danwe réitère sa demande : « Vu la tournure que prend le dossier que tu connais là, il faut effacer nos messages et n’en parle à personne. » Cette demande suscite en sieur Ngambi, un sentiment de suspicion. « Le 19 janvier, j’ai lu dans le forum whatsapp de la Gendarmerie, une publication  qui disait que le journaliste Martinez Zogo a été enlevé… C’est là que j'ai compris que la mission de Justin Danwe n'était pas légale. J'ai  décidé d’en informer mon supérieur hiérarchique, le colonel Ayissi. »

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A la question de savoir si le sous-lieutenant colonel a ouvert une enquête suite à la mission à lui confiée par sieur Danwé, il répond par l’affirmative : « Oui. J’ai proposé à sieur Danwé de convoquer le journaliste pour l’auditionner. Mais, il s’yest opposé. »

Dans le prolongement de l’interrogatoire, le sous-lieutenant Ngambi Legrand est appelé à édifier le tribunal sur le sens de l’expression « donner une bonne correction ».De l’avis du témoin du Ministère public, cela signifie : « ouvrir une enquête, auditionner les témoins, et transmettre le dossier à la hiérarchie. » Aussitôt le propos achevé, des remous, sur fond  de protestations se font entendre dans la salle. Le président de collégialité de procéder à un rappel à l’ordre.

 

 

 

 

 

 

 

 

« J’ai changé de numéro de téléphone. Mais j’ai conservé mon compte cloud. J’ai donc pu récupérer toutes les conversations», Le sous-lieutenant Ngambi Legrand.

 

 

 

 

 

 Me Calvin Job, Avocat des ayants droit de feu Martinez Zogo 

Au cours de son contre-interrogatoire, sieur Ngambi affirme avoir été entendu devant la Commission d’enquête mixte. Cependant, il confie n’avoir pas obtempéré à la demande de suppression des messages, à lui formulée par sieur Danwé. « J’utilisais un téléphone de marque « Iphone ». Ce téléphone dispose d’une fonctionnalité qui permet de récupérer les données des utilisateurs en cas de perte. J’ai changé de numéro de téléphone. Mais j’ai conservé mon compte cloud. J’ai donc pu récupérer toutes les conversations», clarifie-t-il.

Me Séri Zokou, Avocat de l'accusé Léopold Maxime Eko Eko 

Par ailleurs, dans la soirée du 22 septembre, la majorité des Avocats de la défense ont présenté-contre toute attente-des demandes de mise en liberté provisoire de leurs clients. Le tribunal a ordonné la suspension de l’audience, aux fins de délibération. Le lendemain mardi 23, la juridiction de céans a opposé, à chacune des requêtes, une fin de non-recevoir. La suite de la cause est prévue les 13 et 14 octobre prochains.

 

 

    

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Florentin Journaliste