Présomption de détournement de biens publics et coaction : Dieudonné Oyono est accusé d’avoir distrait la somme de 141 millions 731 mille 293 fcfa.

Présomption de détournement de biens publics et coaction : Dieudonné Oyono est accusé d’avoir distrait la somme de  141 millions 731 mille 293 fcfa.
L’infraction aurait été commise dans le cadre de la réalisation des projets financés par le budget d’investissement public (bip) pour l’exercice 2014-2015. Il est par ailleurs reproché à l’ancien recteur de l’Université de douala, la signature des décisions portant ouverture des caisses d’avance, en préparation des jeux universitaires au mois de mai 2014. Au soutien de ses déclarations, le mis en cause dit avoir agi conformément aux lois et règlements.

 

Par Florentin Ndatewouo

 

L’audience du 22 mai dernier a été consacrée à l’audition de Dieudonné Oyono. L’ancien recteur de l’Université de Douala est  accusé des faits de « détournement de biens publics (Dbp), coaction de Dbp) ». L’infraction de détournement de biens publics aurait été commise dans le cadre de l’organisation des jeux universitaires. Lesquels ont eu lieu à Douala au mois de mai 2014. Le Ministère public, pendant la CROSS EXAMINATION reproche au professeur Dieudonné Oyono d’« avoir signé les décisions portant création des caisses d’avance, alors que celles-ci relèvent des prérogatives du Ministre des Finances ». En réaction à cette déclaration, le mis en cause s’explique sur le cadre législatif et règlementaire ayant motivé les décisions pour lesquelles l’accusation lui fait grief.
D’entrée de jeu, Dieudonné Oyono invoque l’article 1 du décret du 19 janvier 1993 portant dispositions communes aux universités d’Etat.  Ensuite, l’accusé se réfère à l’article 35 du  décret du 17 décembre 2005 fixant les règles financières applicables aux universités. Dieudonné Oyono s’appuie également sur la loi du 22 décembre 1999, portant statut général des Etablissement publics administratifs (Epa) et des entreprises des secteurs public et parapublique. Ceci à l’effet de  présenter le mode d’intervention de l’Etat, en l’occurrence le Ministère des finances (Minfi), dans les organes de gestion des Etablissements publics administratifs. L’article 7 de cette loi  dispose : «l’Etat et les collectivités territoriales décentralisées interviennent dans la gestion des Etablissements publiques administratifs et les entreprises de leur portefeuille exclusivement à travers leur représentant dans les organes de gestion. » L’ancien recteur de l’Université de Douala précise que les représentants du Minfi au sein des Universités sont le contrôleur financier, et l’agent comptable, d’après les articles 10 et 74 (1) de la loi sus-évoquée.
A ces instruments juridiques s’ajoute la circulaire du ministre des Finances du 6 janvier 2014, portant instruction relative à l’exécution de la loi des finances, au suivi et au contrôle de l’exécution du budget de l’Etat des établissements publics administratifs, des collectivités territoriales décentralisées, et autres organismes subventionnés. Le point 556 de cette circulaire dispose qu’ « en ce qui concerne particulièrement les décisions de création des caisses d’avance et de mise à disposition des fonds, elles sont signées par l’ordonnateur après examen et visa du contrôleur financier. Les décisions portant virement des crédits obéissent au même principe. »


Décisions querellées


Sieur Oyono dit avoir signé deux décisions « (…) la première portait sur un montant de 450 millions Fcfa. Elle était destinée à l’hébergement et l’alimentation des athlètes. L’Université de Douala a hébergé et nourri pendant une semaine, environ 5000 étudiants, encadreurs, et officiels en provenance de 20 institutions universitaires publiques et privées. Ceci en plus des 50 000 étudiants de l’Université de Douala. » Il dit avoir procédé à l’ouverture des caisses d’avance en application du décret du 15 mai 2013, portant règlement général de la comptabilité publique« Peuvent être payés par intermédiaire d’une régie, les dépenses relatives à l’alimentation dans les hôpitaux, les établissements pénitentiaires et scolaires ainsi que d’autres établissements à caractère social. » Ainsi prévoit l’article  82 (1) de ce décret.
En outre, Dieudonné Oyono affirme avoir signé la deuxième caisse d’avance  à hauteur de 230 millions Fcfa. « Elle était destinée à couvrir les autres dépenses des jeux universitaires qui ne pouvaient pas passer par la procédure de passation des marchés. Par exemple :

le paiement des primes des matchs, les primes des athlètes ;

les locations des tentes, de certains matériels de sport ;

-la gratification des fans clubs ;

-les cachets des groupes d’animation culturels, les cachets des artistes ;

-les dépenses liées au transport des officiels… »

Il dit avoir agi conformément  à la circulaire du 6 janvier 2014, portant instruction relative à l’exécution de la loi des finances, au suivi et au contrôle de l’exécution du budget de l’Etat, des Etablissements publics administratifs, des Collectivités territoriales décentralisées, et autres organismes subventionnés. Ladite circulaire dispose en son point 305 : « de manière générale, les caisses d’avance ne doivent être ouvertes que pour les opérations qui ne s’accommodent pas de la procédure d’engagement. »


Coaction présumée de Dbp


Par ailleurs, Dieudonné Oyono est appelé à répondre des faits de « coaction de détournement de biens publics » avec l’agent comptable sieur Abdoulaziz. Cette infraction présumée porte sur la somme de 141 millions 731 mille 293 Fcfa, pour un montant total d’ 1 milliard 465 millions Fcfa. Des fonds destinés à la subvention des projets financés par le Budget d’investissement public (Bip) pour l’exercice 2014-2015.


L’ancien recteur de l’Université de Douala dit avoir reçu 11 projets en provenance du Ministère de l’Economie, de la planification et de l’aménagement du territoire (Minepat). Pour la réalisation de ces projets, il affirme avoir lancé les appels d’offre aux mois de juin, juillet, et août 2014. La Commission de passations des marchés est convoquée aux mois  d’octobre, novembre, décembre 2014.


Projets et dépenses ordonnancés


Selon Dieudonné Oyono,  03 catégories de dépenses ont été ordonnancées : « La première catégorie porte sur les 03 projets réalisés, à savoir:

-le projet sur l’acquisition et installation des équipements des laboratoires et ateliers à l’Institut universitaire technologique (Iut) a été ordonnancé à hauteur de 73 millions 328 mille 763 Fcfa;

-Le projet relatif à la réhabilitation des bâtiments et équipements de l’Ecole supérieure des Sciences économiques et commerciales (Essec) a été ordonnancé à hauteur de 81 millions 776 mille 240 Fcfa;

-Le troisième projet sur l’acquisition des équipements de la bibliothèque des Instituts des beaux arts de l’Université de Douala à Nkongsamba a été ordonnancé à hauteur de 36 millions 550 mille 125 Fcfa.»


A cela s’ajoute les autres catégories : « nous avons fait les avances de démarrage des projets. C’est dans les clauses des marchés. Nous avons ordonnancé à hauteur de 49% pour la construction d’un bloc pédagogique à l’Institut des beaux de Douala à Nkongsamba à  hauteur de 74 millions 935 mille 330 Fcfa. La deuxième avance a été faite à hauteur de 25% pour la construction d’un bloc pédagogique à l’Institut des Sciences halieutiques de l’Université de Douala à Yabassi. Ceci pour  un montant de 74 millions 944 mille 313 Fcfa. »
La troisième catégorie concerne les projets pluriannuels. « Il s’agit du bloc pédagogique du campus N°2 de l’Université de Douala appelé R+3-1. J’avais ordonnancé les dépenses à hauteur de 246 millions 888 mille 142 Fcfa. Ce qui fait un total global de  548 millions 524 mille 883 Fcfa, pour une enveloppe globale de 800 millions Fcfa pour l’exercice 2014 », expose l’ancien recteur.


Au sujet des dépenses ordonnancées en 2015, Dieudonné Oyono indique que « cet ordonnancement s’élève à hauteur de 91 millions 219 mille 737 Fcfa. Ce qui fait un total global de 679 millions 544 mille 620 Fcfa.» 
La décision portant virement de crédits est également au centre des controverses. « J’ai signé une décision portant virement de crédit le 15 avril 2014 d’un montant de  440 millions Fcfa, ventilé ainsi qu’il suit :

Les équipements informatiques : 16 millions Fcfa ;

L’achat du matériel immobilier à hauteur de 47 millions Fcfa ;

-Acquisition et rénovation de machines à hauteur de 24 millions Fcfa ;

Les jeux universitaires : 353 millions Fcfa. »

Après l’audition de l’accusé pendant 5h de temps, le procès a été suspendu, etret la cause renvoyée au 11 juin prochain. Cette audience prévoit la production par  la défense des pièces à conviction, et la suite de la procédure.