Affaire Sonara Vs Metouck et cie : Un Procès confisqué par l’arbitraire.

Affaire Sonara Vs Metouck et cie : Un Procès confisqué par l’arbitraire.

Aucune suite n’est donnée à la cause, depuis le renvoi à une date sine die, intervenu à l’audience du 04 août de l’année en cours.  Une situation qui rallonge la durée de détention des accusés, privés de liberté depuis 04 ans jour pour jour.

Par Florentin Ndatewouo

L’incertitude autour de l’affaire Charles Metouck et compagnie DEMEURE. Depuis 04 mois et 10 jours, l’ancien directeur général de la Société nationale de Raffinage (Sonara) et son codétenu ne savent à quel saint se vouer. Aucune suite n’est donnée à l’affaire qui les oppose à la Sonara jusqu’à ce 14 décembre. Leur dernière comparution en audience publique date du 04 août de l’année en cours. Ce jour devant le Tribunal criminel spécial (Tcs) à Yaoundé, les accusés répondent à l’appel. L’audience initialement prévue n’aura finalement pas lieu.  Le président de la collégialité procède au renvoi de la cause à une date ultérieure. La décision est motivée par l’absence du dossier de procédure constatée par le Greffier audiencier séance tenante.  

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Le renvoi concédé par le président de la collégialité est Contra Legem. Certes, l’article 342 de la loi du 27 juillet 2005 portant Code de procédure pénale offre au président d’une collégialité, la latitude de procéder-selon les circonstances-au renvoi d’une cause en cours d’instruction. Cependant, elle soumet ce dernier à des obligations : « le président qui ordonne le renvoi doit indiquer à haute voix le motif et la DATE FIXEE pour la prochaine audience. »  Par conséquent, l’article 343 de ce texte normatif évoqué en sus prévoit des SANCTIONS contre l’INOBSERVATION de cette règle : « Le Tribunal ne peut renvoyer une affaire SINE DIE sous peine de poursuites disciplinaires contre le Magistrat, auteur du renvoi. »

Charles Metouck, ancien directeur général de la Sonara, poursuivit pour l'infraction de détournement de biens publics.  

Quid du droit d’être jugé dans des délais raisonnables ?

 

Les accusés sieurs Metouck Charles et Edinguelé Edinguelé Jean sont écroués à la prison centrale de Yaoundé Kondengui depuis le 14 juillet 2017. Ce 14 décembre marque leur 04ème année de détention jour pour jour. Une situation qui s’inscrit aux antipodes des dispositions de l’article 10(5) de la loi du 14 décembre 2011 portant création d’un Tribunal Criminel Spécial. Ces dispositions sont maintenues dans son texte modificatif du 16 juillet 2012. En effet, « cette juridiction (Tribunal criminel spécial, ndlr) dispose d'un délai de six (06) mois pour rendre sa décision. Ce délai peut être prorogé de trois (03) mois par ordonnance du Président du Tribunal saisi. » Dans l’hypothèse d’une prolongation du délai de 06 mois, l’affaire est supposée durer 09 mois. Or, en l’espèce, la durée impartie est largement dépassée. Ceci, en partie du fait des multiples renvois.  

Des renvois à répétition qui portent atteinte aux droits de la défense. En effet, cette dernière bénéficie du droit d’être jugée dans des délais raisonnables. Lesquels droits sont édictés par les textes internationaux auxquels le Cameroun est Etat partie. Il s’agit de l’article 7 (1d) de la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples de juin 1981, ainsi que les dispositions de l’article 09(3) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de décembre 1966.

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Outre Metouck Charles, Edinguelé Edinguelé Jean, d’autres accusés sont également poursuivis dans le cadre de cette affaire. Dame Makamtse Ngatchessi Véronique, épouse Nkegne, sieur Yemwo Molo Godfrey, Moue Mbeleck Michel comparaissent libres. Par ailleurs, l’accusé sieur John Ebong Ngole a rendu l’âme de suites de maladie. Cette disparition intervient alors que l’affaire est encore en phase de jugement devant le Tcs. Metouck Charles, Edinguelé Edinguelé Jean ont fait l'objet d'une condamantion le 21 octobre 2015. Ils ont écopé la peine de 12 ans d'emprisonnement chacun, pour l'infraction de détournement de biens publics. Le préjudice est porté à 108 millions Fcfa. A cela s'est ajouté des amendes pécuniaires pour un montant de 20 millions Fcfa.   

Les lenteurs judiciaires observées dans l’affaire Sonara contre Charles Metouck et compagnie ne sont pas des cas isolés. Au 26 juillet de l’année en cours, l’accusé Amadou Vamoulke assiste au 74ème renvoi de l’une de ses affaires devant le Tcs, selon Reporter Sans Frontière (RSF). De plus, le collectif d’Avocats en charge de la défense des militants et sympathisants du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) parle de 279 renvois enregistrés, dans le cadre des procès en Habéas corpus, de 122 de leurs clients. Ces Casus traduisent en partie, les défaillances qui plombent l’efficacité du système judiciaire camerounais.