Plaidoiries : «Nous faisons l'intercession de monsieur Ottou Anicet...En l'absence des preuves, relaxez-le.»

Plaidoiries : «Nous faisons l'intercession de monsieur Ottou Anicet...En l'absence des preuves, relaxez-le.»

L'Avocat du gestionnaire des caisses d'avance entre les années 2014 et 2015 clame l'innocence de son client. A l'audience d'hier 12 septembre au Tribunal criminel spécial à Yaoundé, Me Zibi déplore le dysfonctionnement du service administratif de l'Université.

Par Florentin Ndatewouo


Le dossier de procédure du tribunal se doit d'être "épuré". Cette opération d'assainissement est voulue par une partie de la défense. Me Zibi, Avocat de l'accusé Anicet Ottou demande à la collégialité du Tribunal criminel spécial (Tcs) de se départir d'un ensemble de documents. Au rang desquels, figurent le  procès-verbal de confrontation de monsieur Mbanga Kollo, enregistré sous la côte I 66. Cette demande est formulée  à l'audience d'hier 12 septembre au Tcs à Yaoundé. Au cours de sa plaidoirie,  Me Zibi évoque au soutien de sa requête,  l'absence de sieur  Mbanga Kollo (Directeur des Affaires administrative et financière, Daaf à l'époque des faits, Ndlr) lors  des confrontations à l'information judiciaire.« Il était également absent devant ce Tribunal. A-t-il été emmené à examiner ses propos contradictoirement ? Cette possibilité ne vous a pas été donné du fait de monsieur Mbanga Kollo.» Dès lors, «Nous vous prions d'écarter le procès-verbal d'audition de monsieur Mbanga Kollo des débats. Cette pièce ne dit pas la vérité», argue Me Zibi. Le défenseur d'Anicet Ottou demande de réserver le même sort au procès-verbal d'audition de sieur Amta, contrôleur financier, pendant l'enquête préliminaire. 


L'accusé Anicet Ottou est poursuivi par le Ministère public et l'Université de Douala. La partie demanderesse lui reproche l'infraction du détournement présumé de biens publics (Dbp),  en coaction avec Dieudonné Oyono. Le montant querellé est de 145 millions 541 mille 293 Fcfa. Le détournement de biens publics allégué découle du défaut de prélèvement de la Taxe sur la valeur ajoutée ( Tva), et de l'Impôt sur le revenu (Ir), sur les caisses d'avance ouvertes pendant les années 2014-2015.

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La défense s'oppose à l'accusation. Elle note que l'accusé Anicet Ottou a reçu des fonds destinés au paiement des prestataires de l'Université de Douala. « Il a pleinement accompli sa mission . Aucun prestataire n'a réclamé un paiement depuis les deux dates.» Me Zibi d'ajouter : «Ce qu'il faut observer, du fait de cette absence de réclamation, c'est que le gestionnaire de la caisse d'avance a satisfait à l'obligation comptable du service fait : le paiement du bon de commande qui  est la contre partie de ce que le marché public a été régulier, a subi une procédure normale de liquidation de la dépense, et au terme de toutes ces opérations, le paiement a clôturé.»

«La non prévisibilité relève d'un dysfonctionnement du  service administratif de l'Université de Douala...»


De l'avis de Me Zibi, la retenue à la source de la Tva et l'Ir relève des attributions de l'agent comptable et non du gestionnaire des caisses d'avance. Il en veut pour preuve, les dispositions des articles 45 et 48 de la directive Cemac (Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale), auxquelles l'État du Cameroun s'est arrimée à partir de l'année 2014.
De plus,  Me Zibi fait appel à la circulaire numéro 0001/c/Minfi du 06 janvier 2014 portant instructions relatives à l'exécution de la loi de Finances, au suivi et au contrôle de l'exécution du budget de l'État, des établissements publics administratifs, des collectivités territoriales décentralisées et des autres organismes subventionnés pour l'exercice 2014. Le point 04 de ladite circulaire dispose: «les recettes recouvrées en vertu d'un titre de perception émis par les ordonnateurs doivent être également adressées au comptable assignataire pour prise en charge.»


Dans son développement, Me Zibi rappelle que la doctrine du droit fiscal camerounais repose sur deux principes, à savoir la prévisibilité et l'annualité. A cet effet, il souligne que la décision portant ouverture des caisses d'avance pour l'exercice 2014 n'a pas prévue la retenue de la Tva et l'Ir. La Tva et l'ir constituent des recettes. «La non prévisibilité relève d'un dysfonctionnement du  service administratif de l'Université de Douala.  Nous pensons très sincèrement que cela a pu lui échapper. Nous n'avons pas de connaissances infuses. Mais les erreurs comme celle là peuvent être fatales.»

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Pour le compte de l'année 2015, la défense dit avoir  agi selon les dispositions de  l'arrêté numéro 001/Minfi/dgi du 07 janvier 2015. Ledit arrêté  fixe la liste des sociétés privées, des sociétés d'économie mixtes, des sociétés à capital public, des établissements administratifs publics,  et les Collectivités territoriales décentralisées, tenus d'opérer la retenue à la source de la Taxe sur la valeur ajoutée, et de l'accompte et de l'Impôt sur le revenu, au titre de l'exercice 2015.

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La partie défenderesse observe que le tribunal ne dispose guère d'éléments probants pour assoir sa conviction sur la participation de l'accusé Anicet Ottou, à la commission de l'infraction qui lui reprochée :«Est-ce que vous avez les faits ? Non. Est-ce que les preuves de la participation de mon client à la commission de cette infraction vous ont été rapportés ? Non. Vous n'avez que de simples allégations.»  Pour la défense, «le seul malheur de mon client, c'est d'avoir été au mauvais endroit au mauvais moment. Le seul malheur de mon client, c'est peut-être sa proximité familiale avec monsieur l'ordonnateur.» En outre, Me Zibi met en garde le Tribunal contre le "malheur" de l'erreur judiciaire: «On a renvoyé devant vous, ceux qui n'étaient en rien concernés par la question du non reversement de la Tva, de l'Ir, des fausses quittances. Nous faisons l'intercession de monsieur Ottou Anicet. Prenez compte en sa situation. En l'absence des faits, en l'absence des preuves, relaxez-le.»
Au terme de la plaidoirie de Me Zibi, l'audience est suspendue. La cause est renvoyée au 15 septembre prochain. Elle sera consacrée aux plaidoiries des Avocats de Dieudonné Oyono.
La plaidoirie de Me Zibi est consécutive à celle de ses collègues, mes  Dongmo, Bagui. Ces Avocats ont plaidé pour le compte de leurs clients, Eyenga Ottou Louis de Gonzagues, Abdoul-Aziz.